samedi 31 janvier 2015


Neige et promenade


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"Même si l'hiver semble donner à tout l'apparence de la mort, dans la lumière nouvelle de la forêt, on recommence à vivre. On avance, plongés dans cette blancheur, source de lumière, entre les hauts troncs couverts d'une mousse d'argent, et le temps aussi devient irréel; l'on vit dans un monde métaphysique comme dans un rêve: le corps n'a plus de poids, le pas de marche est sans fatigue, et l'on avance, vagabondant d'une pensée à l'autre. Dans cet infini, parmi les arbres couverts de neige, les choses de la vie aussi semblent plus claires."

Mario Rigoni Stern, Saisons
traduit de l'italien par Marie-Hélène Angelini
Editions La Fosse aux Ours, 2008







"Se promener:
A peine suis-je parti me promener, mes pensées se remettent à courir, parce que leur circulation interne est activée par les voies visuelles. Les fruits du ravissement de l'oeil éveillent le désir de la langue, la formulation anime les bonds des pensées, les pensées esquissent ou crayonnent un monde à moi avec son espérance et son impuissance, son étendue et ses limites. Avant tout, le moi existentiel se relève à nouveau comme un polichinelle de son sommeil dans le caniveau et se met à se mouvoir, à questionner, à se souvenir. Cela ne se produit qu'en marchant. La promenade amorce la course folle à travers le monde sous le crâne. Chaque chose en déclenche une autre qui se consume au fil de la mèche en tout sens et provoque l'éclosion de différents foyers et finalement un incendie généralisé - tout s'anime."

Paul Nizon, Marcher à l'écriture
traduit de l'allemand par Jean-Claude Rambach
Editions Actes Sud, 1991







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Images:
Être maître de soi, photographie de Gilbert Garcin
Cabane, dessin de Nylso 

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